Un enseignement bilingue à Bruxelles ?

4 septembre 2018 à 15:09 

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Créer des places pour répondre au boom démographique à Bruxelles ou se concentrer sur la maîtrise d’une première langue nationale pour les élèves issus de l’immigration sont autant d’objectifs qui ont participé au recul du bilinguisme, un prérequis pourtant capital sur le marché de l’emploi. Si le débat sur un enseignement bilingue, voire trilingue, n’est pas jeune, il est loin d’être devenu trivial. 

Pour

Guy Vanhengel – Ministre bruxellois des Finances et président du Collège de la Commission communautaire flamande (VGC), en charge de l’Enseignement

L’enseignement a besoin d’innovation. Dans le contexte spécifique de Bruxelles, notre volonté est de continuer à stimuler l’enseignement multilingue, avec une attention pour le français chez les enseignants et les élèves non-francophones afin d’en faire des Bruxellois. Les élèves, les écoles et les parents doivent être encouragés à s’inscrire dans une pédagogie présupposant le multilinguisme et l’esprit civique. Si l’on veut réaliser quelque chose en Belgique, il faut tenir compte de la structure étatique du pays, avec les Communautés, les Régions et le pouvoir fédéral.

En ce qui concerne la création d’une formation bilingue pour enseignants, tant dans les accords gouvernementaux du fédéral, de Bruxelles-Capitale, de la CoCom, de la VGC que de la CoCof, vu le besoin en enseignants bilingues dans notre ville, on retrouve l’ambition de soutenir ce projet. L’amorce importante a été donnée l’an dernier avec une formation bilingue d’enseignants à Bruxelles. Les départements Onderwijs en Pedagogie de l’Erasmushogeschool Brussel et de la Haute École Francisco Ferrer ont pris l’engagement de collaborer pour leur formation d’enseignants du primaire. Ils réaliseront un parcours de « bidiplomation » qui permettra aux étudiants, à l’issue de leur formation initiale de bachelier, de suivre une formation continue raccourcie auprès de l’institution partenaire, où l’accent sera mis sur le perfectionnement linguistique, de sorte qu’ils décrochent deux diplômes d’enseignant. Ils pourront donner cours tant dans l’enseignement primaire francophone que néerlandophone. Ces enseignants plurilingues seront en mesure de répondre aux besoins des élèves bruxellois.

En ce qui concerne la présence d’élèves francophones dans l’enseignement néerlandophone à Bruxelles, on prétend que nombreux sont ceux qui ne maîtrisent pas suffisamment la langue de l’école, ce qui entraîne un retard d’apprentissage. L’inspection note que les écoles bruxelloises affinent continuellement leurs politiques linguistiques.

Contre

Liesbet Dhaene, députée bruxelloise N-VA

C’est une fausse bonne idée. L’enseignement néerlandophone contribue largement à disséminer du bilinguisme dans Bruxelles. Faire des écoles néerlandophones des écoles bilingues ferait chuter le niveau de néerlandais des élèves francophones. On voit déjà aujourd’hui qu’avec 100 % des cours en néerlandais ces enfants ont des difficultés avec la langue. C’est donc en renforçant le néerlandais dans les écoles néerlandophones que les enfants deviendraient vraiment bilingues et combleraient leur retard d’apprentissage. Il faut encore renforcer la qualité de notre enseignement pour rehausser le niveau. Ce n’est pas en tirant le niveau néerlandais vers le bas qu’on va réussir.

Concernant l’enseignement francophone bruxellois, j’ai fait une évaluation de l’apprentissage des langues et il y a vraiment une évolution négative pour le néerlandais. J’ai introduit il y a un an et demi une résolution pour demander à la Communauté française d’investir plus fortement dans l’apprentissage du néerlandais à travers le Pacte d’excellence, mais elle n’est pas encore à l’agenda de la Commission. Je trouve les écoles d’immersion très bien, mais il est dommage qu’il y en ait si peu à Bruxelles, comparativement aux autres provinces.

Si toutes les écoles de la Communauté francophone devenaient bilingues, cela y relèverait bien sûr le niveau de néerlandais. Mais, si on organise un enseignement bilingue dans les écoles francophones et néerlandophones et si on choisit de transférer des compétences des Commissions communautaires francophone et néerlandophone vers la Région et la Cocom, cela va devenir ultra-francophone, comme toutes les choses à Bruxelles qui sont tirées vers la Cocom. Seule la Communauté flamande est, je pense, capable de maintenir un enseignement fort du néerlandais pour les enfants bruxellois. De plus, tous les Bruxellois peuvent  profiter de la qualité de l’enseignement flamand, qui est remarquable au regard des résultats Pisa, ce qui n’est pas le cas de l’enseignement francophone.

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