David Leyssens : « Sign for my future ? Une belle opportunité pour les acteurs économiques »

2 juin 2019 par
BECI Community

Après des années d’ignorance suivies d’années d’insouciance et d’immobilisme, le monde économique s’est mis en marche pour le climat, quasi simultanément aux marches pour le climat qui ont amené la jeunesse dans les rues.  

David Leyssens est le directeur du réseau The Shift, qui promeut la durabilité auprès des entreprises et organisations,et qui a largement soutenu l’initative Sign for my Future. Il estaussi notre rédacteur en chef invité pour ce dossier « Green ».

 

Plusieurs signes l’attestent : le monde économique est aujourd’hui conscient de la nécessité de faire quelque chose pour le climat. Événement inédit, de nombreux patrons sont allés jusqu’à se

© Reporters

mobiliser ensemble et publiquement pour appeler le politique à bouger dans le même sens : celui d’actes concrets et d’un engagement dans une stratégie de long terme pour relever les immenses défis posés par le réchauffement climatique. Ce n’est évidemment pas David Leyssens, le jeune responsable de l’association The Shift, qui va s’en plaindre. 

Par un concours de circonstances qui ne doit rien au hasard, nous clôturons cet article le jeudi 15 mai, le jour même où Lidl Belgium voit ses objectifs CO2 validés par la Science Based Targets Initative (voir encadré). Lidl est le premier acteur de la grande distribution en Belgique, et le dixième dans le monde, à prendre de tels engagements. De quoi faire sourire notre rédacteur en chef invité

 

De Raeren à Anvers, tout le monde s’y met 

À la tête de The Shift, David se souvient de ce jour où il avait organisé une séance d’information à propos des Science Based Targets (SBT). Sa réunion n’avait rassemblé que… deux personnes. Aujourd’hui, les rencontres qu’il organise sur la thématique SBT font le plein.   

Autre secteur, autre lieu. En région liégeoise cette fois, et plus précisément à Engis, sur le toit du bâtiment occupé par la firme Knauf. Comme chez Lidl, c’est en partie grâce au solaire que l’on entend réduire les émissions de gaz à effet de serre : pas moins de 6.000 panneaux photovoltaïques qui produiront 1.700 MWh/an, soit 790 tonnes de CO2 évitées chaque année. À quelques centaines de mètres de là, Prayon, un autre industriel liégeois, mise également sur le photovoltaïque pour réduire en partie son impact climatique. Tandis que sur son site de Puurs, près d’Anvers, c’est dans la cogénération que Prayon a investi pour optimiser sa consommation. On pourrait également citer Armacelle Benelux à Thimister, Sapa Extrusion à Raeren, le port d’Anvers ou encore le fabricant de briques Wienerberger à Aalkbeke : tout le monde semble sur le pont dans le pays.  

 

400 capitaines d’industrie 

Et à Bruxelles ? Les exemples y sont peut-être encore plus nombreux qu’ailleurs en Belgique, en tout cas en termes de densité : en nous concentrant sur les seules installations photovoltaïques, citons Mabru à Laeken, Sibelga à Schaerbeek, le centre logistique Montea à Forest, l’entreprise de travail adapté Travail & Vie à Anderlecht… Tous ces exemples ravissent David Leyssens et décuplent son enthousiasme : « Tout comme ont pu le faire les marches des jeunes pour le climat, l’initiative Sign for my future’ montre qu’il existe bel et bien un élan et un soutien énormes pour une politique climatique ambitieuse dans notre pays. Pas moins de 300.000 citoyens et une coalition composée de 400 capitaines de la société y ont adhéré, dont des directeurs d’ONG, mais aussi des CEO d’entreprises belges, des recteurs d’universités ».  

Il y a quelques semaines, un sondage Beci a permis d’identifier quelques responsables économiques. Nous avons interrogé certains d’entre eux sur cette thématique, aux côtés de leurs enfants – curieusement, seules leurs filles semblent avoir répondu. Et vous le verrez à la lecture de nos doubles interviews, les réponses sont plutôt de nature à réconforter David Leyssens. En termes de mobilisation, dans les familles des patrons, la relève est bien là. 

 

Politique de la main tendue 

Au-delà de cette mobilisation, c’est au mandat confié au politique par les dernières élections que songe David Leyssens, lorsqu’il considère le succès des manifestations pour le climat : « Ce vaste ensemble envoie un message puissant au politique, pour prendre les décisions courageuses qui nous aideront à évoluer vers une politique climatique neutre d’ici à 2050 (…). Maintenant, le nouveau gouvernement doit se mettre au travail avec ce mandat ». Loin d’être naïf, il attend plus que des déclarations de bonnes intentions. Il ne suffit pas de parler de projets pour le climat ; encore faut-il agir efficacement pour faire changer les choses : « L’ambition d’atteindre la neutralité CO2 d’ici à 2050 doit être ancrée dans des lois et des décrets. Dans le nouvel accord de gouvernement, un plan d’investissement ambitieux doit permettre au paquebot de changer de cap » 

Écoutez aussi l’interview de David Leyssens
en podcast (en néerlandais) : www.beci.be/nl/podcast

Un David Leyssens particulièrement exigeant et qui, par les bonnes pratiques et les initiatives vertueuses des entreprises citées en exemple, en viendrait presque à donner des complexes à la classe politique. Notre rédac’ chef invité se refuse toutefois à stigmatiser quelque responsable que ce soit. Son truc à lui, c’est au contraire la politique de la main tendue et de la collaboration : « Sign for my future offre son soutien aux différents gouvernements afin de les aider à relever les défis gigantesques qui nous attendent. Les entreprises voient aussi dans cette transition les opportunités économiques liés à la neutralité climatique. Dans ce contexte et face aux défis, le potentiel d’innovation est énorme, mais il faut un plan d’investissement stable du gouvernement ». 

Johan Debière  

 

 

David Leyssens est le directeur du réseau The Shift, qui promeut la durabilité auprès des entreprises et organisations, et qui a largement soutenu l’initative Sign for my Future. Il est aussi notre rédacteur en chef invité pour ce dossier « Green ».  

 

Science Based Targets Intiative : kesako ? 

Les Science Based Targets (SBT), c’est en quelque sorte un guide à l’usage des entreprises pour se fixer et surtout atteindre des objectifs bas carbone à long terme. Une méthode pour les aider à s’inscrire dans la lutte contre le réchauffement climatique et son maintien sous la barre des 2° C, conformément aux engagements de Paris.  

La démarche est volontaire et repose sur un cadre scientifique. Les efforts à réaliser pour atteindre les objectifs sont ensuite portés à la connaissance des différents secteurs et des différentes organisations dans les pays affilés à cette initiative. Plusieurs voies sont possibles pour y parvenir, comme la SDA (Sectoral Decarbonization Approach). Le ressort des SBT, c’est le principe de la masse critique : seule, une entreprise peut certes apporter sa contribution, mais c’est le nombre qui permet de faire bouger concrètement les choses. Sans rentrer dans les détails, sachez que trois étapes jalonnent le parcours d’une entreprise qui déciderait de s’engager dans les SBT :  

  1. L‘entreprise établit son propre business case, en s’assurant de bien comprendre les méthodes utilisables ;  
  2. Elle fixe ses propres SBT, après avoir choisi la méthode et en se fixant un but à atteindre ; 
  3. Elle annonce son objectif et l’exécute en obtenant un soutien interne, en communiquant et en rendant compte des évolutions. 

Info : https://sciencebasedtargets.org/ 

David Leyssens est le directeur du réseau The Shift, qui promeut la durabilité auprès des entreprises et organisations, et qui a largement soutenu l’initative Sign for my Future. Il est aussi notre rédacteur en chef invité pour ce dossier « Green ».  

BECI Community 2 juin 2019
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