Face à l’augmentation inquiétante des chiffres, le secteur associatif et les entreprises bruxelloises demandent un engagement politique pour lutter contre le sans-abrisme.
Bruxelles,18 juin 2025
9 777, c’est le nombre exact de personnes qui vivent aujourd’hui sans logement stable à Bruxelles. Une hausse de 25 % en deux ans. C’est ce que révèle le dernier dénombrement publié ce 18 juin par Bruss’Help. Une réalité qui s’installe, au cœur même notre capitale.
Chiffres clés du dénombrement :
-Près de 10 000 personnes en situation de sans-abrisme et de mal-logement dont :
-plus de 1600 mineurs dénombrés dans cette situation
-près de 1000 personnes en rue, soit une augmentation de 20 %
-plus de 2000 personnes en squats et en occupations temporaires
En tant qu’organisations du secteur associatif et dirigeants d’entreprises implantées à Bruxelles, nous ne pouvons rester silencieux face à cette situation. Il est de notre devoir de se montrer unis et d’appeler ensemble à une réponse politique forte face à un défi qui touche notre région.
Cette demande se fait, par ailleurs, dans un contexte particulier. Un an après les élections régionales de juin 2024, la Région bruxelloise reste sans Gouvernement. Cette situation de blocage politique ne peut justifier l’inaction face aux urgences économiques et sociales qui touchent les Bruxellois, les entreprises et plus largement toute la société civile bruxelloise.
Une préoccupation partagée
En effet, le sans-abrisme est un défi social évident, mais également socio-économique.
Ses conséquences, en parallèle de la détresse humaine, alimentent le sentiment d’insécurité, nuisent à la qualité de vie urbaine et à l’attractivité de Bruxelles comme lieu de travail, de vie et d’investissement.
Ces dernières années, plusieurs entreprises ont exprimé leurs inquiétudes sur la dégradation du cadre de vie dans certains quartiers, comme dernièrement à la Porte de Namur. Le dernier dénombrement confirme ces signaux : l'exclusion s’enracine et s’étend.
Toutefois, nous ne pouvons souscrire à des one-shot hâtifs, sans réfléchir à leurs conséquences. Nous devons dégager des solutions durables et structurelles.
Dès lors, ensemble, nous appelons à des solutions concrètes de la part de nos responsables politiques autour de trois axes :
- 1. Créer du logement accessible pour l’ensemble des Bruxellois et des Bruxelloises.
L’accès au logement est un maillon fondamental pour endiguer le sans-abrisme. Nous appelons à un renforcement de l’investissement et libérer le potentiel la construction de logements, en ce compris social et à finalité sociale à destination des publics les plus précaires.
- 2. Renforcer les dispositifs sociaux et de santé dans leur accompagnement des personnes sans abri et mal logées.
Les services d’aide aux personnes sans abri ne peuvent plus absorber les trop nombreuses demandes. Il faut renforcer les politiques qui permettent de diminuer le nombre de personne sans abri en vue d’une réinsertion par le logement au sein de la société. Une pérennisation et une augmentation des moyens est nécessaire afin d’y faire face. Les politiques de réinsertion par le logement doivent être couplées à une prise en charge globale : santé physique et mentale, appui administratif, lutte contre les assuétudes, etc.
- 3. Agir pour une politique migratoire digne et réaliste.
Aucune mesure ne permettra de résoudre le “sans-abrisme” sans apporter une solution structurelle aux personnes sans papiers et aux personnes demandeuses de protection internationale laissées pour compte par le pouvoir Fédéral.
Les acteurs sociaux et le secteur économique, sont prêts à contribuer à ces enjeux en tant que partenaires :
1. Investir dans le logement abordable via des partenariats public-privé efficaces
Le secteur privé peut y contribuer, notamment via :
- Le soutien à la mise à disposition de biens immobiliers aux Agences Immobilières Sociales (AIS),
- L’investissement et le financement de solutions de logement pour tous.
2. Soutenir un accompagnement renforcé des personnes vers l’autonomie
Les entreprises peuvent s’impliquer :
- par des dons – de denrées alimentaires, de matériel, de compétences et financiers - aux associations,
- par l’offre de stages, d’emplois ou de formations notamment avec le soutien d’opérateurs comme Duo for a Job pour développer le mentorat, Interskillar, Interface 3, ….
- en collaborant activement avec les CPAS, les opérateurs d’économie sociale ou les initiatives locales de réinsertion.
3. Agir pour une politique migratoire inclusive
Une meilleure intégration par le travail, dès que cela est légalement possible, est indispensable.
Il est incohérent que des personnes aptes à travailler soient laissées sans droits ni perspectives. Concernant les travailleurs sans-papiers, une égalité de droit et un accès à un emploi légal doivent être garantis, par exemple en commençant par supprimer l’exigence de quitter le territoire pour obtenir un permis unique. Il s’agit d’une mesure essentielle, tant pour la dignité des travailleurs que pour la lutte contre le travail au noir.
Pourquoi nous mobilisons-nous ?
Parce que Bruxelles a un caractère à part en Belgique. De par son statut de grande ville et de capitale, celle-ci est exposée à des défis hors normes. Des réponses spécifiques de l’Etat fédéral doivent y être données notamment par un refinancement de la Région.
Parce que nous croyons que la cohésion sociale et la diversité sont un socle de prospérité durable.
Parce que l’image et l’attractivité de Bruxelles dépend aussi de sa capacité à prendre soin des personnes les plus vulnérables.
Parce qu’une économie prospère et un marché du travail qui fonctionne pleinement est essentiel pour sortir durablement de la pauvreté.
Parce que la ville de demain se construira avec tous ses habitants, pas au détriment des plus fragiles.
Parce que sans lutter contre la fracture sociale, nous ne pouvons construire une Bruxelles prospère et qui rayonne à sa juste valeur.