(c) Photo : Igor Omilaev - Unsplash
Avec la hausse des droits de douane décidée sous Donald Trump, les entreprises belges qui regardent vers l’Amérique doivent composer avec une équation plus coûteuse. Certaines choisissent de s’adapter sans renoncer à leur identité.
Depuis plusieurs années, exporter vers les États-Unis faisait figure d’horizon naturel pour l’agroalimentaire belge, mais la donne a changé. Depuis que Washington a relevé ses tarifs douaniers, la traversée de l’Atlantique s’est complexifiée. Entre dollar chancelant, marges sous tension et concurrence locale, les entreprises exportatrices doivent redoubler de souplesse pour continuer de séduire le·la consommateur·rice américain·ne. Geneviève Roberti Lintermans, International Business Development chez Didden, analyse les conséquences et les choix stratégiques que cela implique.
Quand chaque euro ajoute du sel à la facture
Avant ces mesures, les produits européens étaient taxés entre 3 et 6 %. Aujourd’hui, la barre est fixée à 15 %. À cette charge s’ajoute la dévaluation du dollar, qui amplifie encore l’écart. Résultat : un produit qui valait autrefois 1,03 dollar à l’arrivée sur le sol américain en vaut désormais 1,17. « L’augmentation nette, une fois cumulés les droits de douane et change, est d’environ 24 % », explique Geneviève Roberti Lintermans.
Et ce n’est que le début de la chaîne. Transport, stockage, promotion, marges successives des distributeurs : autant de couches qui s’ajoutent avant d’atteindre le consommateur ou la consommatrice. Selon elle, l’impact final se situe autour de 15 %, mais il varie au gré du dollar. Une incertitude permanente qui complique la stratégie des exportateurs.
Produits standard ou de niche : qui séduit à table ?
Toutes les entreprises ne sont pas touchées de la même manière. Les producteur·rices de biens standardisés – sauces de base, biscuits ou mayonnaise « premier prix » – se retrouvent en confrontation directe avec leurs homologues américains. Produits locaux, matières locales, pas de taxes : le différentiel de prix devient difficile à absorber. « Dans ce cas, soit les exportateurs rognent sur leurs marges, soit ils envisagent une production locale », constate l’experte.
À l’inverse, les produits de niche résistent mieux. Chocolats, gaufres, bières d’abbaye ou spécialités fines continuent de séduire une clientèle américaine aisée et curieuse, qui recherche l’authenticité du « made in Belgium ». « Dans les magasins spécialisés, les consommateur·rices acceptent de payer plus cher pour un produit qui raconte une histoire », poursuit-elle. Dans ces rayons, la hausse est plus souvent attribuée à la politique américaine qu’au producteur·rice européen·ne.
L’exemple de Didden : la recette « made in Belgium »
Entreprise familiale centenaire, Didden, illustre bien la capacité d’une société belge à répondre aux attentes américaines, notamment avec ses sauces et confits, déjà adaptés pour d’autres marchés internationaux. Formats plus grands, recettes ajustées pour respecter les règles sanitaires locales, emballages aux couleurs « noir-jaune-rouge » mettant en avant le drapeau belge : l’offre est calibrée sans jamais perdre son authenticité.
« Nous préférons investir dans la recherche et le développement de produits qui correspondent aux consommateur·ices, plutôt que de rogner sur la valeur de ce que nous faisons », insiste Geneviève Roberti Lintermans. Pour Didden, comme beaucoup d’autres, la fidélité à la qualité et à son identité belge prime sur une simple logique de prix. Un choix qui leur permet de rester compétitifs dans un marché exigeant, tout en affirmant leur différence. Les taxes ne font qu’ajouter un filtre supplémentaire à la réflexion stratégique.
Un marché américain toujours appétissant
Si les droits de douane freinent certain·es, les États-Unis continuent d’attirer. Marché immense, consommateur·rices sensibles à la gastronomie européenne, logistique relativement simple par rapport à d’autres régions du monde : l’équation reste intéressante. Il est parfois plus facile d’exporter vers New York que « vers certaines destinations asiatiques où les barrières sanitaires sont encore plus complexes que les taxes », note l’experte en business international.
Ce paradoxe résume bien la situation des exportateurs belges : entre obstacles administratifs et opportunités commerciales, la balance reste fragile. La question n’est pas de savoir si le marché américain est intéressant, mais comment y entrer sans perdre son équilibre.
Le Belgian Dream sous condition de taxe
Les entreprises belges qui visent l’export doivent accepter de jongler avec plusieurs paramètres en même temps : coûts, marges, géopolitiques, attentes locales et identité propre. Didden, comme d’autres maisons familiales, montre qu’il est possible de réfléchir à l’international sans céder aux sirènes du court terme. « La seule réponse, c’est l’adaptation permanente »
Dans cet environnement mouvant, Didden et d’autres continuent de miser sur leur savoir-faire et leur identité pour garder leur place sur le marché américain. Une manière de prouver que, même face aux barrières, la belgitude garde un goût qui séduit au-delà des frontières.
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