Avec près de 95.000 chercheurs et chercheuses d’emploi, Bruxelles reste confrontée à un chômage massif. Au-delà des chiffres, c’est toute l’économie qui tousse. Pour Beci, ce dossier dépasse la sphère sociale et engage directement les entreprises.
Le chômage bruxellois est une vieille histoire. Les chiffres oscillent, les réformes s’empilent, mais le constat demeure : trouver un emploi reste difficile pour beaucoup, et trouver du personnel l’est tout autant pour les entreprises. Derrière les statistiques, ce sont des chantiers retardés, des projets mis sur pause, des investissements freinés... Beci le rappelle: le chômage n’est pas qu’un indicateur social, c’est un frein à la vitalité économique de la capitale.
Marché du travail : un paradoxe bien bruxellois
En août 2025, Actiris recensait 94.821 chercheur·euses d’emploi, soit un taux de chômage de 15,1 %, en légère baisse en un an (-0,8 %). Une diminution qui peut sembler rassurante, mais qui masque deux tendances: l’augmentation du chômage de longue durée et la montée des bénéficiaires du CPAS. Autrement dit, une partie des Bruxellois·es s’éloigne durablement du marché du travail.
Ce décalage frappe de plein fouet les entreprises. Dans la construction, l’Horeca, la logistique ou les soins, les pénuries de profils qualifiés ralentissent l’activité. Résultat : des offres non pourvues, des délais de recrutement qui s’allongent et, au final, une compétitivité affaiblie. Le paradoxe est criant : des candidat·es disponibles, mais trop peu en adéquation avec les besoins du marché. Bref, un chômage massif et, en même temps, des entreprises en mal de talents.
Sortir des silos : public et privé doivent coopérer
« Les entreprises peuvent contribuer à améliorer le marché du travail, mais encore faut-il leur en donner les moyens», souligne Thierry Devillez, directeur Wallonie-Bruxelles de Federgon, la fédération des prestataires privés de services RH. Sans coopération renforcée entre services publics et privés, le système restera bancal. Pour lui, trois chantiers sont prioritaires.
D’abord, fluidifier les échanges entre Actiris et les agences privées (intérim, recrutement, outplacement). Aujourd’hui, trop d’offres se perdent dans les rouages administratifs. Des passerelles plus claires permettraient aux employeurs d’accéder rapidement à des profils pertinents et aux chercheur·euses d’emploi d’avoir davantage d’opportunités.
Ensuite, développer des formations courtes, ciblées, et évolutives, à l’image des actions portées par Travi, l’opérateur de formation du secteur intérimaire. Jobdays, modules pratiques, accompagnement direct: « On teste, on évalue, on ajuste et on repart pour un cycle », résume Federgon. Ce qui fonctionne peut ensuite être étendu. Une méthode pragmatique, qui privilégie la qualité à la multiplication des dispositifs.
Enfin, simplifier le paysage institutionnel. Bruxelles regorge d’opérateurs et de guichets, au point d’en devenir illisible. Pour les entreprises, c’est une source de confusion et de délais. « La réforme doit créer des guichets uniques, pas des couches supplémentaires», insiste Devillez
Les entreprises en première ligne
Du point de vue entrepreneurial, les conséquences du chômage bruxellois se font sentir à plusieurs niveaux. Recruter devient un exercice chronophage. Les offres s’accumulent, les candidatures manquent ou ne correspondent pas, et lorsqu’un profil est retenu, il faut encore investir dans la formation interne. Langues, outils numériques, savoir-être : les entreprises doivent combler elles-mêmes des lacunes de base, avec à la clé un coût financier, mais aussi une perte de temps et d’efficacité.
Face à cette situation, certaines choisissent de s’adapter. Elles misent sur des profils atypiques, valorisent des expériences acquises hors des parcours classiques, multiplient les partenariats sectoriels ou accueillent davantage de stagiaires et d’alternant·es.
D’autres investissent dans des dispositifs de mentorat. Bref, elles innovent pour garder la machine en marche. Toutefois, cette créativité a ses limites : sans reconnaissance institutionnelle ni simplification des dispositifs, elle risque de rester marginale.
En bref
Les acteurs existent déjà : Actiris, Bruxelles Formation, les agences privées, les centres sectoriels, les opérateurs d’insertion. Chacun possède une expertise, mais encore faut-il les faire travailler ensemble plutôt que côte à côte. Si Bruxelles parvient à construire cette cohérence, le chômage pourrait enfin reculer, non pas comme une statistique isolée, mais comme une dynamique collective.
Le chômage à Bruxelles ne disparaîtra pas d’un coup de baguette magique, mais il peut cesser d’être une fatalité si chacun·e accepte de jouer sa part. Beci en est convaincue : les entreprises ne sont pas en marge de ce dossier, elles en sont au cœur.
Réduire le chômage, c’est aussi permettre à l’économie bruxelloise de respirer, d’investir et d’attirer. Et au bout du compte, c’est offrir à la capitale un avenir plus fluide, pour toutes et tous.
Pour que Bruxelles retrouve son souffle économique, il faut un gouvernement bruxellois opérationnel. Pour l’instant, le blocage politique freine entreprises et emplois: Beci et les fédérations sectorielles tirent la sonnette d’alarme. À lire ici